La descente aux enfers d'un Français condamné à mort en Indonésie Par Sébastien BLANC agrandir la photo
JAKARTA (AFP) - Séduit par un salaire hebdomadaire de 2.000 euros pour entretenir des machines productrices d'ecstasy en Indonésie, un artisan-soudeur français se trouve désormais dans le couloir de la mort.Serge Areski Atlaoui, 43 ans, a été condamné mardi à la peine capitale, en même temps qu'un Néerlandais et que cinq Chinois, par la Cour suprême de Jakarta.
"Je suis révolté", a déclaré mercredi à l'AFP ce natif de Metz (nord-est de la France), à l'intérieur de sa prison dans la banlieue de la capitale indonésienne. "Je ne peux pas l'accepter".
Il y a deux ans, l'homme spécialisé dans la construction métallique travaillait à son compte aux Pays-Bas.
Touchant 1.600 euros par semaine, en rétrocédant "50% aux impôts", il accepte une offre alléchante : créer une "fabrique d'acrylique" en Indonésie, pour une somme hebdomadaire, versée au noir, de 2.000 euros. "J'ai su par la suite que ce n'était qu'une couverture", reconnaît-il.
En septembre 2005, M. Atlaoui participe donc à l'ouverture de l'usine clandestine à Serang, à 60 kilomètres à l'ouest de Jakarta. Il installe des "mixeurs, pompes et machines à distiller".
Son employeur lui demande ensuite de s'occuper de la maintenance du matériel. "Je restais à mon appartement et quand une machine était cassée, ils me téléphonaient et je venais réparer".
Il affirme être alors persuadé que l'usine servait à effectuer des "tests" de fabrication du MDMA, le composant de l'ecstasy, sans produire de cachets.
"J'étais sans crainte car ils m'avaient dit qu'ils ne faisaient que des tests".
Le laboratoire illégal est démantelé en novembre 2005 dans un raid de la police. Arrêté et écroué, le Français sait que l'Indonésie réprime sévèrement le trafic de stupéfiants. "Je me suis dit : je vais m'en tirer avec 15 ans (de prison)". Il se trompe.
A l'issue d'un procès-fleuve, le procureur demande sa tête. M. Atlaoui est finalement condamné, le 6 novembre 2006, à la réclusion criminelle à perpétuité. La sentence est confirmée en appel.
Devant partager avec deux autres détenus une cellule de 6 mètres carrés, l'artisan-soudeur tente de ne pas sombrer, en s'adonnant à la lecture. Au bout de 9 mois, il obtient de déménager dans une cellule plus spacieuse. En janvier 2007, il se marie même en prison avec sa compagne, Sabine.
La décision de la Cour suprême est tombée mardi comme la foudre : Serge Atlaoui doit être fusillé, car c'est ainsi que sont exécutés les condamnés à mort en Indonésie.
Le technicien est convaincu d'être injustement châtié, vu qu'il effectuait des tâches subalternes de maintenance. Il assure ne pas avoir touché aux stupéfiants. "Je ne suis pas chimiste".
Selon lui, la justice indonésienne a dans cette affaire épargné les accusés indonésiens, condamnés à 20 ans de prison alors qu'ils auraient directement participé à la confection de la drogue.
"Tous les étrangers se retrouvent avec la peine de mort. Ils (les autorités indonésiennes) veulent dire que les étrangers polluent leur pays", affirme-t-il. "Ils (les juges) se servent de mensonges pour justifier la peine de mort".
Il lui reste l'espoir d'une grâce présidentielle. Le verdict de la Cour d'appel pourra être contesté uniquement si l'on découvre un nouvel élément de preuve, a indiqué à l'AFP Nancy Yuliana Sanjoto, l'avocate du condamné.
Elle a estimé que selon la jurisprudence indonésienne M. Atlaoui aurait dû écoper de "nettement moins" que la peine capitale ou que la perpétuité.
"Il existe diverses possibilités pour relancer un appel judiciaire mais il nous faut trouver un nouvel élément. Nous allons tout tenter", a promis Me Sanjoto.